mardi, 12 février 2019 11:23

Discours d'adieu

Ces jours-ci je me suis dit qu’il est plus facile d’arriver dans un lieu que de partir, surtout quand on y reste 11 ans. 11 ans c’est une partie importante d’une vie. Il y a quelque temps une personne m’a rappelé que quand je suis arrivé ici j’étais le plus jeune de la communauté, je ne portais pas de lunettes, les cheveux blancs étaient rares ; maintenant je porte de lunettes et la neige a blanchi mes cheveux.

Quand je suis arrivé, je n’avais aucune idée de ce qui m’attendait. Je savais qu’il y avait la paroisse avec ses 44 clochers et que ma mission était plus précisément de faire naître un centre de spiritualité autour de St Pierre-Julien Eymard.

J’ai vécu des années intenses ; je me suis engagé à fond, avec toutes mes énergies. J’ai donné beaucoup. J’ai cru au projet concernant le père Eymard. Au niveau de la paroisse j’ai toujours essayé de donner ma contribution. Au début j’ai donné mon apport à l’aumônerie, et après c’est surtout la pastorale santé qui a pris une place importante.

Mais, j’ai reçu beaucoup ; j’ai appris beaucoup. J’ai vu se réaliser ce que Jésus dit dans l’évangile : « Donnez, et l’on vous donnera ; c’est une mesure bien pleine, tassée, secouée, débordante, qui sera versée dans le pan de votre vêtement » (Lc 6,38). Je pars avec le pan de mon vêtement bien rempli de tout ce que vous m’avez apporté en humanité, amitié et vie spirituelle.

La Mure PBarbiero3Ces jours-ci j’entends les gens me dire : « Vous avez fait beaucoup, père ». Oui, c’est vrai. Mais je dois dire, en toute sincérité, que j’ai pu faire ce que j’ai fait parce que Dieu a toujours mis sur mon chemin les personnes qu’il fallait au bon moment, et les personnes rencontrées ont accepté de m’accompagner, de m’aider avec leurs compétences.

Donner de noms est toujours risqué, mais je ne peux pas éviter ce risque. Quand il a été question de remettre en ordre la Maison Eymard j’ai trouvé une grande collaboration en André Escallon et Jean Vigna. Quand il a été question de projeter et réaliser l’Expo j’ai rencontré Jean-Pierre et Anne-Marie Sappey. Quand il a été question de faire naître l’association « Les amis du père Eymard en Matheysine » voilà la présence de Marcel Delay et de Brigitte Cassard. Quand est arrivé le moment de renouveler la Chapelle Eymard voilà l’apport d’Alain Cassard et beaucoup d’autres bonnes volontés. Et la liste pourrait continuer pour citer tous ceux qui ont collaboré d’une manière ou d’une autre à toutes les manifestations concernant le père Eymard (je pense en particulier à l’Expo et à la Maison Eymard).

Ce que j’ai pu faire vous appartient. Le chemin est ouvert, à vous de le continuer et d’en ouvrir des nouveaux. St Paul écrivait au Corinthiens : « Moi, j’ai planté, Apollos a arrosé ; mais c’est Dieu qui donnait la croissance. Donc celui qui plante n’est pas important, ni celui qui arrose ; seul importe celui qui donne la croissance : Dieu. (…) Nous sommes des collaborateurs de Dieu, et vous êtes un champ que Dieu cultive, une maison que Dieu construit » (1Cor 3,6-9).

Je pars avec la richesse apportée par plusieurs personnes qui aujourd’hui sont auprès de Dieu. Leur souvenir m’accompagnera. Là aussi je prends le risque de donner des noms : Marcel Delay, Monique Royer, Huguette Savin, Bernard de la Fayolle, Louise Tadiello, Lino Donati, Gisèle Michon, Jacqueline Del Cros, Florent Prieur, Théodora, André et Geneviève Hostache.

Il y a aussi d’autres personnes que je porterai avec moi, elles seront présentes dans ma prière, je pense surtout aux malades, en particulier à Ginette Moutin, Gina Verdin, Odette Procura, Jacques Hacquard, Marcel Zayer… et aux amis de la Sézia (Anne-Marie De Noni).

J’ai partagé mon chemin avec père Jean-Claude, père Dominique, père Armand, père Vergel, père Alain, père Julian et père Martin. Aujourd’hui, j’adresse un message d’encouragement aux confrères qui ont accepté de s’engager au niveau de la paroisse et du centre de spiritualité : acceptez le défi de travailler ici, dans le pays du père Eymard, avec les personnes qui vivent dans cette région. Les difficultés ne manqueront pas, mais vous aurez aussi joies et surprises en abondance.

Quelqu’un a écrit : « Refuser d’aimer par peur de la souffrance, c’est comme refuser de vivre dans la peur de mourir » (Jim Morrison). N’ayez pas peur, et donnez tout ce que vous pouvez donner. Le centuple que Jésus promet dans l’évangile à ceux qui laissent tout pour lui s’est réalisé. Evidemment aujourd’hui j’ai comme l’impression de « perdre » ce centuple pour commencer une autre mission, et cette « perte » n’est pas sans souffrance. Mais il faut avancer, c’est notre vie en tant que religieux.

Là où je vais, je ne serai plus en paroisse, mais dans une maison de spiritualité en Toscane, une région d’Italie. Nous avons un grand couvent (plus de 50 chambres individuelles), où nous accueillons prêtres, religieux, groupes paroissiaux, laïcs, couples et familles pour des retraites spirituelles, journées de resourcement et de formation. Ce sera un autre type de vie, mais je mettrai à profit l’expérience faite ici.

Ces jours-ci, j’ai reçu beaucoup d’expressions de reconnaissance de votre part. Je remercie chacun et chacune, je remercie tous ceux qui dans le silence et la discrétion m’ont aidé et rendu des services. Vous m’avez fait confiance. Merci.


par P. Manuel Barbiero, sss