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mardi, 14 août 2018 16:55

Session sur le vœu de la personnalité

par Valérie Gioanni

La Mure 25/06 - 4/07 2018.
Nous avions choisi de faire cette retraite à La Mure proposée par le père Manuel Barbiero pour approfondir notre compréhension du « don de soi » si cher au p. Eymard. Je dis bien « retraite », car ces 10 jours n’étaient pas seulement un temps de formation, ni même une simple session sur le « don de soi », mais un temps privilégié pour rester « aux pieds du Seigneur, et écouter sa parole » (Lc 10, 39).

Temps privilégié où nous avons laissé l’Esprit Saint nous conduire, mais aussi Lieu privilégié puisque nous avons vécu ces 10 jours dans la maison du p. Eymard. C’est avec émotion que nous avons célébré l’eucharistie et prié dans la pièce où le saint a passé ses derniers jours, nous confiant nous aussi, à la Mère de Dieu.

Autour du p. Manuel Barbiero il y avait le père Claude Taffet du Canada, les pères Gabriele Di Nicolò et Guglielmo Rota d’Italie, les pères Richard Mouanda et Carlos Dos Santos du Congo Brazzaville, le père Mateus Almeida du Mozambique, qui (pour notre grande joie) a rejoint La Mure depuis seulement 2 mois, Édith Grimaud (laïque agrégée) et son mari Jean-Claude de Grenoble, et Valérie Gioanni de Lyon.

Ensemble, nous avons relu la grande retraite de Rome pour essayer de comprendre toutes les intuitions, les préoccupations et surtout le cheminement du p. Eymard qui l’ont amené à faire le don de sa personnalité le 21 mars 1865.

Dès notre premier jour de retraite, la préoccupation principale du p. Eymard rejoint la nôtre : « Seigneur, que veux-tu que je fasse ? » (NR 44,4) et avec elle, chacun a pu sentir tous les renoncements intérieurs que cette question impliquait. Car pour être à l’écoute de la volonté de Dieu et l’accueillir en son cœur, nous comprenons qu’il faut d’abord « renoncer à sa propre volonté », renoncer à son amour propre, renoncer à nos évidentes certitudes, à nos sécurités intérieures, couper les amarres pour avancer au large, se libérer de tout ce qui empêche l’Esprit Saint d’entrer dans nos cœurs et nous sclérose dans nos habitudes.

Comme Pierre-Julien Eymard, nous avons senti toute la difficulté, toute la douleur profonde de cette démarche de renoncement. Nous étions fils d’Abraham à qui le Seigneur a dit : « va ! quitte ton pays... ». Et pourtant, nous dit le saint, ce n’est qu’en se dépouillant du vieil homme en soi que nous trouverons la paix et la liberté (cf. NR 44,14).

Dès lors, la deuxième question que se pose le père Eymard devient aussi la nôtre : « comment arriver là ? »… comment arriver à un tel renoncement ? Sa réponse jaillit comme une évidence : « PAR L’AMOUR !! » (NR 44,62)

Suivant les pas du Saint, nous sommes allés sur le rocher de Saint-Romans où le p. Eymard a découvert la tendresse de Dieu. Nous avons pris un temps de silence pour contempler les merveilles que Dieu a faites dans nos vies et nous remémorer tous les actes d’amour dont il nous a comblés. Car Dieu nous aime le premier (1Jn 4,19). Contempler Son amour infini suscite en nous la gratitude, l’action de grâce, la confiance et le désir d’aimer en retour. Notre amour n’est donc que la réponse (un bien pauvre balbutiement) à l’amour de Dieu.

Dès lors, ce que nous appelions "renoncement" ou "dépouillement" le premier jour devient offrande d’amour, don de toute sa personne. Car le propre de l’amour, c’est de donner, tout donner, jusqu’à se donner soi-même, jusqu’à donner son moi intérieur, jusqu’à renoncer à sa propre volonté...

Ainsi dépouillé de soi, notre cœur pouvait accueillir pleinement le Christ et vivre en communion avec Lui. Cette admirable communion d’amour entre notre 

humanité et Sa divinité (certains d’entre nous vous  parleraient avec joie d’une union hypostatique !!) trouve son plein accomplissement dans l’Eucharistie. C’est là que le Christ vient s’incarner en nous... vivre en nous ! Il peut alors murmurer à notre cœur ce qu’Il veut que nous fassions : aimer comme il aime et célébrer l’amour... chacun dans son propre cénacle. Car oui, le p. Eymard l’avait bien compris : le Christ ne veut pas qu’on l’enferme dans un tabernacle, dans un cénacle ni même dans nos églises, mais il veut s’incarner en nous, dans nos vies, nos familles, nos communautés, nos lieux de travail. L’eucharistie devrait se vivre partout... dans chaque maison, dans chaque rue, partout où l’amour se donne et se partage. À chacun de trouver le cénacle où il est attendu, pour célébrer le sacrement de l’amour !

Pendant ces 10 jours, nous avons partagé nos doutes, nos espérances, nos joies, nos rires, nos peines... nos vies. Peut-être même que quelques larmes d’émotion se sont échappées ici ou là. Mais... c’était aussi la coupe du monde, et la France a brillamment vaincu l’Argentine !!!

Dans ce groupe d’une grande diversité de culture, d’âge, de vie, nous avons partagé une joyeuse fraternité. Ensemble, nous avons rendu grâce, célébré l’amour et rompu le pain... et pas seulement dans l’oratoire !

Enfin, comment ne pas remercier vivement p. Manuel pour son organisation sans faille, sa grande pédagogie, sa patience, sa bienveillance et la sollicitude avec laquelle il a cherché à faire progresser chacun d’entre nous sur son chemin de foi ?

Merci aussi à tous les laïcs de l’association « Les amis du père Eymard en Matheysine » qui ont veillé discrètement à ce que nous ne manquions de rien, ainsi qu’à notre aimable cuisinière Séverine, véritable cordon bleu !

Nous souhaitons à tous ceux qui nous liront de pouvoir faire l’expérience de ce temps de grâce, dans les lieux mêmes où le p. Eymard a vécu, et d’entendre eux aussi dans le silence de leur cœur la réponse à la question que nous nous posons tous : « Seigneur, que veux-tu que je fasse » ?